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28 mai 2014 3 28 /05 /mai /2014 13:12

Faut-il "fêter" les quinze années d'un traitement ... occasion de refaire le point sur la pratique au moment où d'autres traitements s'annoncent ... histoire de ne pas oublier !

Un texte "dans le ton" d'Anne Buisson* le 23 mai 2014 devant les responsables de MSD et des centaines de gastroentérologues et pharmaciens hospitaliers venus pour l'occasion assister à deux jours de formations : Crohn'ologie ! AAM

" Je suis tombée dans les MICI par hasard à la fin des années 90, et ça a été d’une extrême violence. J’avais été embauchée pour ouvrir le bureau de l’afa deux jours par semaine et répondre au téléphone et aux mails des malades et des familles. Et là, et là, j’ai découvert un monde de souffrance et d’isolement de jeunes personnes - de mon âge- que je ne connaissais pas, que je ne soupçonnais même pas, un monde où la maladie n’était pas toujours soulagée par les traitements existants. Ça donnait de longues hospitalisations, et comme l’afa, à l’époque, logeait dans le service de gastroentérologie à l’hôpital Rothschild, j’étais aux premières loges pour voir les malades qui me rendaient visite et restaient des semaines voire des mois à l’hôpital après avoir épuisé tous les traitements.

Au téléphone certaines personnes semblaient cloîtrées dans leur tour d’ivoire, sans pouvoir en sortir, sans vie sociale. Et le seul contact qu’ils avaient était cette permanence téléphonique. D’autres (et ils étaient nombreux) passaient obligatoirement pas la case « chirurgie », ce qui ne leur offrait pas un avenir particulièrement rose puisque ça ne leur permettait pas de mettre un terme à la maladie. Alors, lors qu’est arrivé le Rémicade, il a suscité un espoir incroyable pour tous ces malades pour qui on ne pouvait « plus rien faire ».

Sur les forums, on parlait d’un traitement fabuleux venu d’ailleurs, des États Unis. J’ai assisté à ce moment là à un engouement incroyable pour les anti-TNF, comme si LA solution miracle était arrivée. Au téléphone, les questions fusaient pour savoir « comment s’en procurer ». Énormément de malades souhaitaient en bénéficier malgré le peu de recul et le manque de connaissance sur ces traitements.

A l’afa, il a fallu adopter le ton de la raison et attendre de voir les premiers résultats concrets en France. Marc Lémann, membre de notre Comité Scientifique à l’époque, faisait de longs articles dans notre journal aux adhérents pour calmer un peu le jeu.

Mais il faut quand même avouer que l’effet rapide et salutaire pour quelques-uns nous a fait vite comprendre qu’on avait à faire à un médicament pas comme les autres. Les hospitalisations longues, les chirurgies ont été moins nombreuses et certains se sont sentis revivre au point de reprendre notamment une vie professionnelle, une vie familiale, totalement normale.

Je me souviens particulièrement d’une jeune femme qui m’avait écrit une petite carte postale après avoir passé le premier été , depuis bien longtemps, dans une forme olympique, pour me dire qu’elle avait pu enfin profiter des vacances estivales avec ses jeunes enfants.

« Chère Anne depuis notre dernière rencontre, je suis en rémission complète, les anti-TNF ont changé ma vie. J'ai recommencé mes voyages avec ma famille, alors que pendant des années, je me le suis interdit. Même l’imaginer m’était impossible tellement l’angoisse des toilettes et de la crise était forte. Cet été, j’ai vraiment profité de mes jeunes enfants alors que les années précédentes, ma maladie m’enlevait le plaisir d’être simplement avec eux. Je revis. » Lydie, 30 ans en 2002, malade de Crohn

Je me souviens qu’un petit jeune de dix neuf ans, hanté par une énième opération, a pu reprendre sa scolarité sans repasser sur le billard « Même si la maladie, elle, ne disparaît jamais, disait-il, cela m’a permis d’envisager sereinement le bac. J’étais aussi très complexé par mon apparence physique et c’est vrai que l’assèchement de ma fistule m’a redonné de la confiance en moi et j’ai pu à nouveau m’imaginer avoir des relations avec une femme. » Sébastien, 34 ans aujourd’hui, marié, deux enfants.

Je ne vais pas vous faire l’égrenage du « je me souviens » à la Georges Perec, mais je pourrais vous donner de multiples exemples, et vous en avez sûrement vous-mêmes, de comment les anti-TNF ont révolutionné la vie de certains malades.

Pourquoi faut-il se souvenir d’ailleurs ?

Il faut se souvenir, parce que c’est important y compris pour les malades qui bénéficient de ces traitements aujourd’hui de façon plus précoce, c’est important de savoir d’Où l’on vient. Pour se dire que ça a avancé, et qu’il n’y a pas RIEN eu.

Durant ces 15 années, le monstre n’a pas été terrassé, mais on lui a trouvé quelques points faibles.

C’est important de se souvenir, et de voir le chemin parcouru, quelquefois semé d’embûches, le chemin du changement de la pratique clinique et il est long, le chemin de l’optimisation des anti-TNF et il n’est pas terminé, avec cette peur durant ces années, de ne pas griller ces dernières cartouches, l’angoisse de l’échappement thérapeutique.

Quel malade, quel parent d’enfant malade ne nous a pas demandé un jour : Et si les anti-TNF ne fonctionnent plus ? (point d’interrogation)

Pourtant, si la prise en charge des MICI a changé avec les anti-TNF, il y a des choses, elles, qui n’ont pas changé.

Quinze après le Rémicade, les peurs des malades face à aux anti-TNF sont bien réelles, toujours les mêmes et toujours aussi fortes. Il suffit d’aller sur les forums de l’afa pour compter le nombre de post qui en parlent, pour voir que prendre ce traitement n’est pas une mince affaire. Je vous en ai relevé quelques uns : « J'ai un Crohn depuis environ 2 ans cortico résistant je débute de l'imurel et je vais avoir des perfusions d’anti-TNF. J'aimerai avoir l'avis de personnes ayant subi ce traitement » « Je vais commencer les anti-TNF la semaine prochaine, mais j'ai une trouille bleu des effets secondaire (cancer...), pouvez vous m'en dire plus ?» Réponse : « En ce qui concerne les effets secondaires, ben oui, il y en a des tonnes comme tout traitement pas anodin mais bon il faut faire avec et si tu déplies, la notice de l'Humira, du Rémicade etc.... autant te jeter par la fenêtre tout de suite ! »

Les effets secondaires à court et long terme sont des questionnements légitimes pour des jeunes malades qui vont vivre avec la maladie 50 ou 60 ans durant. Et nous savons qu’ils ne sont pas anodins. Il suffit également d’entendre les malades en parler dans ce petit film réalisé par l’afa « biothérapies, les malades en parlent » pour savoir qu’il reste beaucoup, beaucoup à faire pour l’accompagnement des malades au moment où on leur propose une biothérapie. En particulier dans cette période actuelle faste en nouveautés thérapeutiques avec une ribambelle de médicaments dont les jolis noms finissent tous par MAB." Anne Buisson

* Anne Buisson a elle aussi fêté ses 15 ans ... d'afa, "Grandes Oreilles" des malades les premières années, elle est devenue depuis "LA VOIX" de l'afa en tant que Responsable de la Communication et est également chargée du volet Recherche-Médical. Son mot préféré : être JUSTE ...

Les 15 ans d'un anti-TNF, le Rémicade ... pour savoir d'où l'on vient !
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